Dans un royaume pas si éloigné, un porteur de lunettes cherchait vision claire, Des équipements optiques de qualité, sans vider sa bourse ni son coffre. Il découvrit l’offre « 100% Santé », une proposition alléchante, Des montures abordables, des verres de qualité, tout en préservant sa vue éclatante.
Mais voilà qu’un murmure parcourut les rues, la nouvelle fit le tour, Les équipements de la classe A, c’était 100% fabriqué à l’étranger, sans détour. Le porteur de lunettes, dans sa naïveté, s’étonna de cette étrangeté, Comment pouvait-il être « 100% Santé » et faire fi de toute rationnalité ?
Il se rendit chez l’opticien, une mine inquiète et perplexe, L’opticien, avec bienveillance, expliqua les tenants et aboutissants de cette offre complexe. « Mon cher porteur de lunettes, ne t’en fais pas », dit l’opticien avec calme, « C’est 100% Santé pour toi, mais pour la fabrication, c’est 100% lointain ».
Le porteur de lunettes gratta sa tête, se demandant ce qu’il devait faire, Entre sa santé visuelle et le patriotisme, il était dans la misère. « Ma bonne dame, mon bon monsieur, ne faut-il pas un juste équilibre? », « D’un côté la santé, de l’autre la fabrication, ce n’est pas facile à célébrer ».
Ainsi va la vie dans un royaume pas si serein, Où le porteur, l’opticien et l’État se retrouvent dans un étrange train. La singulière prime, telle une farce amère, Révèle l’absurdité d’un choix sans lumière
Après deux ans de vie sociale au rythme du coronavirus, qui a révélé un grand nombre de dysfonctionnements dans l’organisation du système de santé, l’heure est venue d’examiner le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2022.
L’ occasion d’entendre une litanie tristement familière : déserts médicaux, difficultés d’accès aux soins, filière visuelle annoncée et toujours pas amorcée… Le Gouvernement tente de passer en force : accès direct à certains professionnels de santé – kinés, psychologues… – sans passer par la case du médecin généraliste censé gérer le « parcours de soins » ; délégations de tâches permettant aux orthoptistes de prescrire des corrections sans passer par la case ophtalmo… De quoi susciter la colère des professionnels concernés qui s’étonnent d’un manque de concertation…
Dans le même temps, le Sénat a réalisé une seconde injection dans le cœur des Ocam en doublant la taxe Covid « au regard des économies réalisées par ces organismes pendant la pandémie », la fixant à 1 milliard d’euros pour 2021, au même niveau qu’en 2020, . Il est vrai qu’en dépit des demandes de « modération », les assureurs ont annoncé d’augmenter très fortement les contrats, entre 7 à 10 % selon la Fédération des mutuelles indépendantes, quand l’inflation n’est que de 1,5 % en 2021.
Le système de santé à deux vitesses s’enkyste, chacun le perçoit confusément quand il attend près de 80 jours en moyenne pour obtenir un rendez-vous chez l’ophtalmo…
Et on entend parler d’un rapport du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie qui agite le spectre d’une grande Sécurité sociale, créant un seul et unique organisme de remboursement pour un même soin.
L’idée déjà promue par certains pour un système plus solidaire, ne peut qu’irriter les mutuelles. Florence Jusot, économiste de la santé, déclare au Progrès: « Leur avenir, c’est la difficulté politique de ce choix. Elles auraient toujours une place pour le remboursement des dépassements d’honoraires ou les quelques soins qui resteraient mal remboursés par la sécurité sociale, ou qui ne sont pas reconnus comme la diététique ou l’ostéopathie. Les mutuelles auraient évidemment une part de marché plus faible et seraient les perdants de ce choix ».
Pour les assurés, ce serait au contraire un système plus simple et plus lisible. À n’en pas douter, le feuilleton de l’automne à suivre sur Public Sénat !
À l’occasion d’une séance de questions à l’Assemblée nationale, le sénateur Xavier Iacovelli (Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants), élu des Hauts-de-Seine, s’est ému que le dispositif du 100 % santé ne bénéficie pas complètement au made in France. Low cost, sûrement pas français, a-t-il insinué, souhaitant « favoriser la production française et soutenir nos PME », via un label « visant à mieux informer nos concitoyens et à les éclairer dans leurs choix ».
Cette auto-qualifiée « piste de réflexion intéressante » a suscité une molle réponse de la part du ministère de la Santé, arguant tout de même d’un bilan positif, « 48 % des prothèses dentaires posées entre janvier et septembre 2020 sont incluses dans le panier « 100 % santé » sans reste à charge pour les Français », a-t-il bataillé sans préciser l’origine des produits. « Certaines [prothèses] sont d’origine française. Les verres sont traités antirayures, antireflets et amincis. Il ne s’agit absolument pas de matériel low cost ou au rabais. »
Le Groupement des industriels et fabricants de l’optique estime quant à lui exorbitant « le prix payé par la filière de fabrication pour le succès de cette réforme, alors que ces verres et ces montures 100 % santé ne sont pas fabriqués en France ». Lors d’une réunion du comité de suivi de la réforme le 15 septembre dernier, il a évoqué « la difficile quadrature du cercle pour un gouvernement récemment engagé en faveur de la relocalisation des capacités de production en France, notamment s’agissant des industries de santé ».
Ce 100% santé, ce reste à charge zéro, ce « raque zéro », est-il une reforme compatible avec les attentes de chacun : patients, professionnels de santé, mutuelles, réseaux, industriels et l’État ? NON ! Pour citer Mendès France (on a les références de ses artères…) : « Gouverner, c’est choisir, si difficiles que soient les choix. Choisir, cela ne veut pas dire forcément éliminer ceci ou cela, mais réduire ici et parfois augmenter ; en d’autres termes, fixer des rangs de priorité. »
Ainsi on ne peut que se réjouir du départ en fanfare du 100% santé dans le secteur de l’audition, une étude Harris interactive pour l’UFC-Que choisir et le réseau Santéclair, citée par le sénateur Iacovelli, a montré que 50 % des ventes d’appareils auditifs réalisées en janvier et février 2021 (dès leur intégration dans le dispositif) ont porté sur des offres sans reste à charge. On sabre le champagne d’un coté, soupe à la grimace de l’autre… Quel est la provenance des appareils de classe 1 auditif ? La question est légitime et attend une réponse circonstanciée des pouvoirs publics que ce soit en audio, optique ou dentaire. Les origines des produits multiples, les labels nombreux : « Made in France », « Origine France Garantie »… doivent être explicites pour le patient citoyen et contribuable.
La liberté d’un choix avisé et responsable, c’est ce que nous attendons de notre système de santé.
C’est un sondage qui devrait ravir la rue de Ségur, où niche le ministère de la Santé (s’il n’était pas débordé de tous côtés par des variants qui rendent la surveillance des courbes épidémiques sismique : un coup on pense que ça va, le lendemain on reconfine à Dunkerque… Bref !). Selon le baromètre BVA pour le syndicat des audioprothésistes, si 51% des Français ont entendu parler de la réforme du 100% Santé, ils sont 88% à penser que c’est une bonne réforme ! Neuf Français sur dix contents, on devrait carrément faire sauter les bouchons de champ’, non ?
« Cette réforme est la meilleure du monde » a déclaré l’optimiste patron du syndicat, Luis Godinho, lors d’une conférence de presse le 23 février. Que nous envieraient les autres pays européens ! C’est vrai qu’en Angleterre, le panier 100% santé n’est pas folichon, si l’on en croit les films où tous les boys portaient les mêmes lunettes à montures noires, pas sexy pour un sou. Il paraîtrait même, toujours selon Luis Godinho, que des Français résidant à Londres (il en reste quelques-uns après la vague du Brexit…) apprécieraient de venir se fournir ici, chez les audioprothésistes sympas qui, en plus de fournir des appareils de qualité, offrent aussi du conseil…
L’audio est le dernier secteur à être couvert par le 100% santé depuis le 1er janvier dernier. Comme l’optique et le dentaire, il pourra profiter de l’augmentation du recours aux soins, l’objectif affiché par la réforme. Mais comme l’a montré une étude de Carte Blanche partenaire, les Français apprécient d’avoir le choix : le panier du 100% ou les montures plus chères, la classe II plutôt que la classe I, contrairement à nos meilleurs ennemis les Anglais qui doivent prendre les trucs moches du NHS (National Health System). Ainsi la part de l’offre 100% santé en optique est de 7,2% dans le réseau qui réunit 3 opticiens sur 5 en France, contre 53% dans le dentaire. « Le choix et la décision appartiennent aux consommateurs », indique la plateforme.
Liberté, c’est inscrit au fronton de nos mairies. Et en ces temps de couvre-feu, confinement et autres interdictions, la liberté aussi minime soit-elle, fait du bien…
Et c’est sans doute cette soif de liberté qui a poussé les mutuelles à augmenter leurs tarifs et à moins bien rembourser des prestations qui ne sont pas couvertes par le 100%… Pour l’UFC Que choisir, qui veille au grain et dénonce « la maladive cupidité » de certaines mutuelles, trop c’est trop ! Certains contrats subissent une inflation de 4,1% alors que les mutuelles ont profité de la crise sanitaire (moins de soins à rembourser). L’association admoneste le Gouvernement et lui demande d’assurer une meilleure lisibilité des garanties, pour que la résiliation à tout moment du contrat d’assurance, entrée en vigueur le 1er décembre dernier, devienne une réalité.
En cette annus horribilis, ce vœu qui nous froissait les oreilles de sa trop grande banalité, résonne à nouveau intensément. Oui, la santé ! Ce bien ô combien essentiel, que nous souhaitons conserver le plus longtemps possible. Ces professionnels engagés que nous avons applaudis à 20h. Ce bien commun qu’il faudra réinstaller dans nos frontières si nous voulons collectivement lutter contre les prochaines pandémies annoncées…
La santé, ce sont d’abord les soins, auxquels, selon Olivier Véran, 63% des Français ont dû renoncer pour des raisons d’argent… L’argent est le nerf de la guerre sans doute, mais n’oublions pas la présence de professionnels de santé… La désertification médicale creuse son chemin, avec une démographie en berne : à titre d’exemple, l’Île-de-France a perdu 479 médecins libéraux en 18 mois nous indique le Quotidien du médecin le 11/12 !
Et la crise sanitaire, qui a déjà coûté la vie à plus de 60 000 Français, a contraint un nombre considérable de personnes à décaler des soins, par impossibilité de se rendre chez leurs médecins, par peur de choper ce satané virus dans la salle d’attente de l’hôpital, parce que l’urgence cette année terrible, se focalisait ailleurs… Selon le Journal du dimanche du 22 novembre, on comptait 2 millions de séjours en moins dans les hôpitaux, et jusqu’à – 87% de diagnostics du cancer colorectal… (Merci le confinement, épisode 1 !)
Et ceux qui y sont allés ont morflé : d’après un bilan de Santé publique France, depuis le début de l’année 2020, 15 654 personnes ont contracté le virus dans un établissement de santé : 9 041 patients, 6 604 soignants et 9 visiteurs…
Mais il faut regarder le futur avec optimisme. Car à partir du 1er janvier 2021, nos oreilles vont pouvoir se réjouir, puisque l’application des tarifs maîtrisés pour l’appareillage auditif entrera en vigueur… C’est le cas pour les appareils de classe 1, qui apportent une correction auditive de base, avec un prix plafonné, tandis que la classe 2, la grande classe, concerne des appareils évolués, connectés, plus chers.
Nous regardions ailleurs pendant que des combats se menaient, que des angoisses affleuraient. Nous avons presque oublié cette année les bisbilles des mutuelles, mais déjà les syndicats bruissent : Luis Godinho, président du Syndicat des audioprothésistes, prévient : « toutes les complémentaires ne jouent pas le jeu du 100 % Santé et vont nuire à cette réforme en augmentant le reste à charge de ceux qui choisissent la classe II. » Idem pour le Syndicat national des entreprises de l’audition, qui marque son territoire : « La prise en charge des malentendants ne doit pas être la variable d’ajustement de la réforme du 100 % Santé ». Des vieux mots, des vieux combats, inadaptés au monde d’après… Prenez soin de vous, sortez masqués et bonne année !
Vos oreilles décrassées de publicité pendant la pause estivale, où elles ont été bercées par le doux chant des vagues et des cigales invisibles, ont sans doute été un peu surprises, quand la bise fut venue, d’entendre sur les ondes radio ce spot d’une banque-assurance prétendant couvrir mieux ses assurées avec une offre 100% santé, annonçant fièrement la fin des renoncements aux soins.
Nous, ça nous a un peu choqués. D’une part, le 100% santé n’est pas une gentille invention des assureurs, banquiers, etc. puisqu’il découle d’une réforme que nous tentons de vous expliquer depuis plus d’un an, qui oblige les mutuelles et autres à proposer un panier intégrant une offre « zéro reste à charge » pour les lunettes, prothèses dentaires et auditives.
Qu’à cela ne tienne. En cette rentrée bercée par l’incertitude, ce biais cognitif que notre cerveau n’aime pas, mais alors pas du tout, il est de bon ton de jouer sur l’amnésie collective plutôt que sur l’honnêteté. Avez-vous entendu une mutuelle, assureur, etc. communiquer sur l’obligation qui leur est faite à partir du 1er septembre de transmettre les informations sur les frais de gestion à tous leurs adhérents et futurs adhérents ? Un arrêté publié au Journal officiel le 7 mai 2020 a défini les modalités de communication… Non, ça ne vous dit rien ?
Vous n’avez pas non plus entendu parler de la brochure éditée par l’Unocam, (Union nationale des organismes complémentaires de l’assurance-maladie), « 6 clés pour mieux comprendre et bien choisir sa complémentaire santé » ? Pourtant, on y voit décryptés les modalités d’intervention des complémentaires, des cas pratiques illustrés de ce que rembourse chacun, les restes à charge et les bonnes questions à se poser pour choisir une complémentaire. Dommage non ? On vous l’offre ici. (Il y a même un glossaire, très bien fait…)
Par ailleurs, ce petit comparatif sera très utile, car bientôt, promis, chacun pourra résilier son contrat à tout moment, au-delà de la première année d’adhésion. Cette disposition prévue par la loi n°2019-733 du 14 juillet 2019 relative au droit de résiliation sans frais ni pénalités des contrats de complémentaire sera prise par décret. Vous pensez qu’une campagne de publicité vous préviendra ?
Au vu de la pandémie, le titre de cet édito pourrait paraître honteusement déplacé… Cependant, la publication du Haut conseil de la famille et de l’enfant du 17 avril dernier nous a titillé l’œil. « L’incidence des réformes du 100 % santé et de la complémentaire santé solidaire pour les personnes âgées » indique en effet que plus nous vieillissons, plus nos dépenses de santé augmentent : 4 460€ par an de 60 à 79 ans et 7 230€ pour les plus de 80 ans. Bien sûr, nous avons déjà paraphrasé ici notre philosophe favori, Coluche, qui disait qu’il valait mieux être jeune et en bonne santé que vieux et malade, mais quand même, 7 230 € par an, c’est le prix d’une très belle croisière, non ?
La solidarité nationale
Heureusement l’assurance maladie prend 80% de ce montant à sa charge, le reste à charge est donc en moyenne chez les personnes âgées de 832€ par an.
Mais là où le bât blesse, c’est que la couverture complémentaire des plus âgés est beaucoup plus chère. À la retraite, en théorie, ils ne bénéficient plus des contrats collectifs supportés en partie par les entreprises. Donc pour un ménage de plus de 60 ans, le budget annuel du RAC et des cotisations complémentaires s’élève à 1 800 €, les trois quarts étant affectés au paiement des primes…
Les niveaux de retraites étant disparates ainsi que les garanties proposées, on perçoit facilement la part que cela peut représenter sur les budgets des ménages.
Et le RAC zéro dans tout cela ?
Tout comme les primes, le RAC augmente avec l’âge. On l’a dit au premier paragraphe, si vous suivez bien. La philosophie du 100% santé ou RAC zéro, dans une société où le risque de solidarité intergénérationnelle s’effrite, est de permettre un accès aux soins renforcé pour ces tranches d’âge. Et de réduire à zéro le taux de renoncement aux soins qui reste assez important, pour les plus de 65 ans : 9% en optique, 15% dentaire et 30% en audioprothèses.
Mais ça c’était avant. Dorénavant le déficit de la sécurité sociale est estimé à 41 milliards d’euros en 2020, pire que le vertigineux déficit de 2010, qui avait suivi la crise de 2008. Les assurés n’en sont pas responsables, mais après avoir vu l’augmentation de leurs cotisations en dépit des engagements des organismes complémentaires, ils verront peut-être le panier de soins solidaire réduit comme peau de chagrin en 2022.
Professionnels : – Pester contre les complexités administratives du nouveau système, parler de « chemin de croix » pour établir un devis. – Râler sur les petites lignes à décrypter dans l’instruction n° DSS/SD2A/SD3C/SD5B/SD5D/2019/116 relative aux contrats d’assurance maladie complémentaire responsables qui précise le contenu du nouveau panier de soins. – S’énerver contre des codes LPP fournisseur, pas révisés depuis Eschyle et contre les machines qui ne vont pas assez vite. – Refuser les avancées pour une santé solidaire, préférer la complexité. – Se débattre avec les foires aux questions du ministère de l’économie pour savoir comment faire un devis. – Exiger une baisse de la TVA.
Patients : – Râler sur la hausse des cotisations attendue. – Craindre une dégradation de la qualité des prestations avec le panier des soins. – Constater la hausse des cotisations, alors que la ministre de la Santé avait exigé des complémentaires qu’elles restent dans les clous de la réforme.
Ces comportements ont pu nous amuser, nous fatiguer. Ils sont aujourd’hui dépassés. Il a suffi d’un nouveau mot à notre vocabulaire.
Le Sars-CoV 2, nouveau coronavirus, responsable de la nouvelle maladie Covid-19
Il rythme vos jours et vos nuits. Parti de Wuhan où les premiers morts ont été détectés, le virus paralyse aujourd’hui le monde entier : 77 pays et territoires ont pris des mesures de confinement total ou partiel. Depuis le 17 mars, la France est en mode pause. Sidération… Silence… Après le déni, place à l’incompréhension, à la panique, à l’exode, puis peut-être à la colère, et enfin à la créativité.
Les professionnels de santé s’organisent. Les premiers de corvée, les soignants dans les hôpitaux et les Ehpad paient un lourd tribut, envoyés à la guerre sans protection. Nous n’y reviendrons pas.
Le
20 mars, les dentistes gèrent un dispositif d’urgence. Si votre praticien usuel
n’est pas dispo, un dentiste de garde est disponible en appelant le 09 705 00 205, dispositif
mis en place par l’ordre des chirurgiens-dentistes, avec l’aval du ministère de
la Santé.
Fin
mars, les opticiens mettent en place un dispositif « inédit » : il
est possible de faire appel à un « opticien de garde », sur le
même modèle que les pharmaciens de garde. Un réseau d’opticiens volontaires répond à des situations d’urgence : renouvellement
des équipements cassés ou perdus, délivrance d’un équipement optique pour le
personnel soignant dans le cadre du plan Covid-19…
La fondation pour
l’audition
mobilise ses partenaires pour offrir une heure de téléphone gratuite
supplémentaire avec un service de transcription. Elle met en ligne des fiches
d’activité pour les parents d’enfants malentendants, recense les initiatives
solidaires, les « conférences confinées » en langue des signes,
indique ce qui reste accessible en termes de soins. Etc.
La solidarité, so 2020.
Pendant ce temps, la téléconsultation enregistre un boom : 486 369 ont été facturées la semaine du 23 au 29 mars, contre moins de 10 000 par semaine début mars, puis 80 000 la semaine du 16 mars. Les téléconsultations constituent désormais plus de 11% de l’ensemble des consultations contre moins de 1% avant la crise.
C’est un fait : l’entrée en application de la réforme
du reste à charge zéro patine. Chez les opticiens, on déplore des semaines
d’attente pour faire passer les dossiers auprès des mutuelles. On râle parce
qu’on a de plus en plus de travail, avec toutes les tâches administratives, et
de moins en moins d’argent. Une tribune des opticiens du réseau Expert en santé
visuelle (ESV) alerte les pouvoirs publics sur le « contexte économique
pesant » et souhaite
une baisse de la TVA.
Du côté des dentistes, ça râle aussi. L’union dentaire,
syndicat représentatif, attirait l’attention du tout nouveau ministre de la
Santé, Olivier Véran, sur ces problèmes : il est « incompréhensible
et inacceptable » disait-il que les organismes complémentaires
« ne [soient]
pas être en conformité avec la loi plusieurs semaines après leur obligation de
prendre en charge ces traitements et alors même qu’elles ont eu près d’un an
pour s’y préparer »…
Du côté des consommateurs, ça colère. D’après l’UFC
Que choisir, les complémentaires profitent de la réforme pour augmenter
leurs tarifs, avec une hausse moyenne de 5%, et des évolutions allant de 0% à
plus de 10%. Enquêtant auprès de ces adhérents, l’association conclut :
« Si 10 % des assurés répondants ont vu leur cotisation
augmenter de moins de 1,9 % en 2020, les 10 % les
moins bien lotis ont subi une inflation supérieure à 12,5 %, qui
dépasse même dans plusieurs cas 35 % ! » Bons élèves, les
mutuelles, qui augmentent modérément, tandis que les institutions de prévoyance
plafonnent. Ces « écarts béants » de prix poussent l’UFC que Choisir
à demander au ministre de publier les décrets au plus tôt pour rendre effectif
le droit de changer de contrat quand les assurés le souhaitent.
Malheureusement, Olivier Véran, ancien rapporteur d’une
réforme des retraites un chouia malmenée, qu’il a troquée pour une crise de
l’hôpital somme toute endémique, avant d’hériter d’une nouvelle crise sous la
forme du Covid19… n’a pas pris le temps d’examiner ces requêtes. À l’heure où
nous écrivons ces lignes, il se rend dans l’Oise à la recherche du patient zéro…
Les Français ne
comprennent rien aux démarches de simplification menées à brides abattues par
le Gouvernement… Le 8 janvier, après avoir visité un centre mutualiste pour observer la mise en œuvre
de la réforme du 100% santé, Agnès Buzyn s’est fait copieusement houspiller sur Twitter… D’aucuns lui conseillent de
« choisir une paire de lunettes qui [lui] permette de voir correctement la
situation des hôpitaux », d’autres lui répondent déserts médicaux et
réforme des retraites : « L’accès aux soins c’est AUSSI s’assurer que les
cabinets médicaux et paramédicaux sont en place de façon durable ! La hausse
des cotisations liée à la réforme des retraites va menacer ces cabinets et par
rebond TOUS les citoyens. Désert médical pour tous ? »… La majorité des
citoyens, avec un sens de la mesure propre au réseau social, la traite tout
simplement de « menteuse », puisque les mutuelles ont augmenté leur
cotisation, au grand dam de la ministre qui leur avait demandé de raison garder.
Agnès Buzyn fatiguée, exprimait juste avant Noël ses doutes, quant à son maintien au Gouvernement, dans un groupe
Whats’App ministériel qui a fuité. Las, entre la grève qui dure, la démission
de 1200 chefs de service hospitaliers de leurs tâches administratives, le
climat social n’est pas à la réjouissance…
Comble de l’amalgame, ce tweet d’une union départementale CGT, ironisant sur les
violences policières, devenues un autre sujet d’aporie politique de la
macronie, et le 100% santé.
« Plus aucune raison de ne pas faire grève ! Plus aucune raison de ne pas venir en manifestation ! Avec #100pourCentSanté: Matraque dans les chicots = chicots remboursés! LBD dans les lunettes = Lunettes remboursées! #GreveGenerale#ReformeRetraite#greve2janvier»
Malheureusement
pour la ministre, la réforme du reste à charge zéro bugge aussi du côté des
opérateurs. Nous avons déjà évoqué ici le
problème des codes et des nomenclatures, des machines qui ne sont pas prêtes
pour assurer le passage sans douleur à une tarification claire… Nous avons
aussi parlé du désir d’un tiers-payant intégral qui serait une condition sine qua non d’un reste à charge zéro, pour
lequel les professionnels de santé freinent… Selon l’Argus de l’assurance, Patrick Solera, président
de la Fédération des syndicats dentaires libéraux (FSDL), estime que le
tiers payant appartient « aux concessions à ne pas faire » car
« on ne peut pas se mettre sous la tutelle des Ocam ». Du côté
des opticiens, un peu plus de mesure, mais des exigences : « Nous demandions
de lier le tiers-payant aux contrats responsables, mais nous n’avons pas
été entendus », selon André Balbi, président du Rassemblent des
opticiens de France (ROF). Le directeur général de Swiss Life prévoyance
et santé résume l’état d’esprit ambiant en ce début d’année : « Il y a une
méconnaissance assez forte des Français. Déjà que les spécialistes ne
comprennent pas tous la même chose, alors imaginez le grand public »…
Ça y est : à
partir du 1er janvier, l’offre 100% Santé optique est disponible.Selon un communiqué de
presse du ministère de la Santé, on se félicite que « dans ce cadre,
changer de lunettes sur prescription médicale sera totalement remboursé »
et que l’offre sera « de qualité » avec des montures « répondant à tous les besoins de correction
visuelle et présentant de bonnes performances techniques (amincissement, verres
anti-rayures, verres antireflets). »
Le ministère
précise que chacun pourra composer ses lunettes, choisir des verres 100% santé
et des montures plus chères qui dans ce cas, seront remboursées dans la limite
de 100% pour la monture. Et là, c’est un peu le drame. D’une part, on a vu s’amonceler
des menaces dans la presse qui s’intéresse aux sous des Français (mais what else ?, en cette période de
vaches toujours désespérément maigres si on en croit la lassitude qui s’est
exprimée sur les ronds-points et ailleurs, week-end après week-end de cette
très longue année). Du style, exercice de maths (Capital, 18/12) :
« Sachant que le coût médian d’une monture est de
135 euros selon les calculs du ministère de la Santé, une monture sur deux
induira un reste à charge supplémentaire d’au moins 35 euros à compter de
l’application de la réforme. Si la monture est évaluée à 200 euros, ce sont 100
euros qui resteront à charge pour l’assuré, deux fois plus qu’avant la réforme.
En revanche, rien ne change pour les montures allant jusqu’à 100 euros. »
D’autre
part, le 100% ne s’appliquerait pas à tout le monde, déplore le groupe All, centrale d’achat qui fournit
des lunettes à plus de 2000 opticiens indépendants, mais aux personnes qui
bénéficient d’un contrat responsable (quasiment tout le monde) ou la nouvelle
complémentaire santé (plus de 10 millions de personnes). Et de fustiger un
système qui les empêcherait de conseiller les montures les plus chères et les
verres made in France.
Ce pays
n’est pas raisonnable. D’un côté on râle parce que le système n’est pas
universel, de l’autre chacun défend son pré carré…
Par
ailleurs, tous les opticiens doivent désormais présenter un devis double,
comportant au minimum un équipement 100% Santé. Et là, tout le monde s’applique
à démontrer que c’est très très compliqué. Comme nous vous l’expliquions en
novembre, de histoires de codes viennent embrouiller la volonté de
simplification affichée par l’équipe gouvernementale tous azimuts. Une réunion
du comité de suivi et une publication claire comme de
l’eau de roche de la DGCCRF plus tard, les choses se dessinent. En cette
période de trêve des confiseurs, restons zen, nettoyons vos lunettes et regardons
les choses avec un peu de recul…
Ça patine dans la semoule… À quelques mois de la mise en
application de la réforme, désormais mieux connue sous le nom de « 100%
santé », le diable se niche dans les détails – comme souvent – et certains
agitent le spectre d’un retard à l’allumage.
Selon les professionnels de l’optique, un chantier freine la
volonté gouvernementale : celui des codes LPP fournisseur, nécessaires à
la prise en charge des équipements optiques. Les opticiens doivent détenir une
identification individuelle de chacun des produits inscrits en description
générique sur la liste des produits et prestations prévue à l’article L. 165-1.
Vous n’y comprenez rien ? C’est normal. Disons que les anciens codes
n’avaient pas été révisés depuis, pff… et qu’il en faut des nouveaux pour
correspondre aux dispositifs médicaux pris en charge à 100%. La Sécurité
sociale vient donc d’inventer un double système, une tolérance de coexistence
pendant quelques mois des anciens et des nouveaux codes. Jusqu’en juillet 2020
pour l’optique médicale et le grand appareillage orthopédique.
De la cuisine interne, certes. Mais les bons codes font les
bons amis. Surtout que s’ajoute à cette première complexité l’exigence formulée
par la ministre de la Santé d’avoir un
tiers-payant intégral fonctionnel en même temps que le 100% santé. Et là,
nos amis des organismes complémentaires ne sont pas contents, ils ne veulent
pas qu’on leur impose des choses.
Rappelons que cette idée ne date pas d’hier : Marisol
Touraine alors ministre de la Santé l’avait prévu pour 2017, personne n’était
pour, enfin pas les médecins libéraux ni les complémentaires, donc. Un rapport
de l’Inspection générale des affaires spéciales plus tard, et quelques
développements informatiques aussi, une plateforme dite Paymed a été testée,
dans six régions. Elle a l’air de fonctionner mais voilà le hic : « InterAMC,
qui réunit les plus grosses complémentaires santé, refuse de passer une
convention nationale et collective. Il veut que chacune des 474 complémentaires
signe une convention avec chaque professionnel », a expliqué Luis Godinho,
président de l’Unsaf, au
Parisien.
Comment voulez-vous qu’on y arrive ?
Techniquement nous savons faire, a déclaré la ministre. Il
suffit que les professionnels de santé s’en emparent et que les complémentaires
jouent le jeu. À cette complexité politico-technocratique, certains préfèrent une
100% Sécu, un système où la Caisse assurerait une prise en charge complète
des soins, conduisant à la disparition des complémentaires. Des doux
utopistes ?
Le reste à charge zéro avance masqué. Alors que la
traditionnelle étude de la Direction de la recherche et des études statistiques
de la Sécurité sociale (la Drees) sur les
dépenses de santé montre qu’en 2018, les Français ont consacré en moyenne 3
037€ à leur santé, il n’en demeure pas moins que sur cette somme, 78% sont de
fait payés par la Sécu.
Le reste à charge des ménages, ce que les Français paient de
leur poche est d’environ 210 € par an, soit 7% des frais réels de santé, contre
7,5% en 2017. Même si ce budget varie considérablement selon l’âge ou l’état de
santés, sera-t-il équivalent à zéro avec le reste à charge zéro ?
Peut-être est-il bon de rappeler, en ces temps de trouble
dans le pacte républicain et alors que le rituel projet de loi de financement
de la Sécurité sociale sera examiné prochainement par le Parlement, que le système
français est un mix entre la cotisation et l’assurantiel. La CSG, les
cotisations sociales, c’est vous qui les payez. Et puis, vous payez aussi une
complémentaire pour avoir un peu de marge au-delà du pot commun de la solidarité
nationale.
Et là, alors qu’Agnès Buzyn ne cesse de rappeler à l’ordre
les complémentaires pour qu’elles ne répercutent pas sur leurs tarifs les
surcoûts liés à la mise en place du RAC 0, c’est un peu la foire d’empoigne…
Selon l’AFP, qui a consulté une demi-douzaine de courtiers, la tendance
haussière serait engagée, notamment pour les plus âgés ou les personnes mal
couvertes… La Macif a beau jeu de déclarer qu’elle ne ferait pas subir à ses
adhérents l’inflation annuelle des coûts de santé (un élément de calcul qui n’a
rien à voir avec le RAC 0), elle prévoit quand même d’appliquer une hausse
tarifaire liée à l’âge (!)… Depuis Coluche, tout le monde connaît la
chanson : Mieux vaut être jeune et riche que pauvre et sans-dents…
Mais le Gouvernement met la pression sans relâche sur le
secteur qui, entre la réforme du RAC 0, celle de l’aide à la complémentaire
santé qui devient au 1er novembre une CMU-C contributive, et les
exigences de transparence ou « engagement
pour la lisibilité des garanties de complémentaire santé » qui doit
permettre aux assurés de mieux comparer les offres, semble pour l’instant le
plus stressé…
Objectif « Zéro délai en 2022 », tel est le cri du cœur du Snof, principal syndicat des ophtalmologistes qui constate, avec une étude réalisée par le CSA, qu’il faut encore attendre 43 jours en 2018 pour obtenir un rendez-vous avec un spécialiste. « Zéro délai » pour « zéro reste à charge », on peut penser que les astres s’aligneront en 2022.
Rappelons que durant l’année 2016-2017, le délai moyen pour
voir un ophtalmo était de 66 jours. « Cette amélioration significative des
délais de rendez-vous a été obtenue grâce à une implication sans précédent des
ophtalmologistes. Des mesures complémentaires comme le développement de
l’exercice en sites secondaires ou l’optimisation des agendas via la prise de
rendez-vous en ligne devraient encore soutenir la dynamique sans démédicalisation, a indiqué le docteur Bour, président du Snof, dans un
communiqué de presse.
Premier
facteur de succès : la prise de rendez-vous en ligne est en effet de plus en
plus courante et permet aux patients comme aux professionnels de mieux gérer
leurs agendas. Le Dr Bour commente : « Nous
sommes convaincus que l’optimisation de la gestion des plannings est un levier
déterminant pour l’amélioration des délais : 3 à 10 personnes par jour ne
viennent pas à leur rendez-vous… c’est un vrai gâchis ! Avec la moitié des
praticiens libéraux ayant un site de prise de rendez-vous en ligne,
l’ophtalmologie est une spécialité leader en la matière. Le potentiel de
développement est encore important : nous avons pour objectif que les 3/4
des cabinets soient équipés d’ici deux ans. »
Que de défis à relever ! Que 2022 sera belle !
En
attendant, le cabinet
Deloitte
a questionné les patients sur leurs attentes en matière de santé. Bizarrement,
ils sont moins optimistes. Plus de la moitié d’entre eux craint que la réforme
100% santé amène une hausse des cotisations (58%) et 30% s’attend à une
dégradation de la qualité des prestations.
Et
ces Français, ces indécrottables conservateurs, ne veulent pas changer leurs
habitudes de consommation pour coller au panier standard. Ainsi, aucun
changement à attendre de 67% d’entre eux en matière dentaire, 66% pour ce qui
concerne l’optique.
Améliorations
d’un côté, angoisses de l’autre. En attendant, il faut chausser de bonnes
lunettes pour déchiffrer le diable dans tous les détails de cette instruction N° DSS/SD2A/SD3C/SD5B/SD5D/2019/116
du 29 mai 2019 relative aux contrats d’assurance maladie complémentaire responsables
et qui précise le contenu du nouveau panier de soins. Non, ne nous remerciez
pas, c’est cadeau !
Selon les études scientifiques (ça fait toujours bien de commencer comme ça), comparé aux hommes sains d’oreille et d’esprit, ceux qui souffrent de déficit auditif léger auraient un risque relatif de déclin cognitif plus élevé de 30%, ceux ayant une perte auditive modérée de 42% et ceux dont la perte auditive est sévère de 54% ! C’est énorme, et ça s’explique : la « presbyacousie » pourrait isoler la personne et entraîner une perte de lien social… Un engrenage vers la solitude, le manque d’interactions sociales, et une moindre sollicitation neuronale.
C’est ce que révèle une étude américaine qui vient donner du poids à cette phrase de l’écrivain David Lodge dans la Vie en sourdine : « Les sons ont du sens, ils véhiculent de l’information ou communiquent un plaisir esthétique. Le bruit est laid et dépourvu de sens. La surdité transforme tant de sons en bruits que vous préférez opter pour le silence ». CQFD.
La réforme du RAC Zéro devrait donc avoir un bénéfice en termes de santé mentale des Français, qui ne sont pas des adeptes de la consultation chez l’ORL : « Un Français sur deux ne va jamais consulter de sa vie un spécialiste pour faire contrôler son audition », s’inquiétait Jean-Louis Horvilleur, audioprothésiste impliqué dans l’organisation de la Semaine du son, qui sensibilise les Français à la santé de leurs pavillons et agit pour diminuer l’agression sonore.
Une prise en charge précoce avec des prothèses auditives adaptées permet dans la plupart des cas de vivre une vie normale, de ralentir la perte d’audition et de ménager ses neurones. Or, jusqu’à très récemment, ces prothèses coûtaient un bras, passez-nous l’expression, et retardaient l’équipement. Depuis le 1er janvier, près de 8 000 patients auraient bénéficié d’un remboursement amélioré, selon la directrice de la Sécurité sociale. Le reste à charge est pour l’instant réduit de 200 euros par aide auditive, le prix de vente est passé de 1 500 à 1 300 euros pour les aides labellisées, celles figurant dans le panier de soins. Ce n’est pas encore du 100%, puisqu’il faudra attendre 2021 pour atteindre cet objectif, mais c’est une première étape, vers un monde où l’on s’entend (à peu près) bien…
Ce n’est pas un poisson
d’avril… La nouvelle convention dentaire entrée en vigueur le 1er
avril, jour de fake news tous azimuts, marque un premier pas vers le
remboursement intégral des prothèses promis pour le 1er janvier
2021. Vous vous y perdez dans tous ces premiers ?
Reprenons : en juin dernier, la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) et l’Union dentaire ont signé avec l’assurance maladie un copieux texte de 147 p. visant à « rééquilibrer, dans la durée, l’activité des chirurgiens-dentistes dans le sens d’une valorisation des actes conservateurs et d’une stratégie fondée sur la prévention et l’accès aux soins dentaires », dixit la Sécurité sociale.
En clair, quatre axes
sont définis : revaloriser les soins dentaires (entre 40 et 60%), tout en
créant des plafonds pour 70% des actes prothétiques, qui devraient être à terme
être remboursés intégralement (c’est là qu’on retrouve notre reste à charge
zéro). La prévention et la prise en charge des populations plus fragiles
constituent les deux derniers axes de la convention.
Concrètement, les
prothèses dentaires du panier de soins 100% Santé, notamment les couronnes
céramo-métalliques jusqu’à la première molaire incluse, se voient appliquer les
premiers plafonds, soit 530€. Celles-ci passeront à 500€ maximum au 1er
janvier 2020, date à laquelle les complémentaires santé intégreront la prise en
charge intégrale.
Certains soins seront
également mieux remboursés MAIS d’autres actes vont augmenter. « En acceptant
le plafonnement des tarifs, nous avons fait des efforts pour les patients.
C’est pourquoi nous allons augmenter les prix de certains soins », a
déclaré Thierry Soulié, le président des Chirurgiens-dentistes de France.
Ce qu’on gagne d’un
côté, on le perd de l’autre… Pour certains dentistes, loin de clarifier le
paysage, cette convention préfigure une nouvelle complexité : « Établir un
devis pour un patient va devenir un véritable chemin de croix : trouver les
bons codes, traiter les retours des mutuelles en fonction de leur statut
d’assuré sans compter ceux des patients qui n’y comprendront rien… Le choc de
simplification tant espéré n’aura évidemment pas lieu, c’est même le contraire
qui se produira. » prédit le Dentalist.
Loin de nous l’idée de
jouer les oiseaux de mauvais augure ! Et puisque les professionnels se
forment aux arguties de ce nouvel outil, il peut être utile d’y jeter un œil…
Stéphane Junique, capitaine du vaisseau amiral Harmonie mutuelle, qui se targue d’être la première mutuelle de France avec plus de 4 millions d’assurés en santé, a pris la décision surprenante d’appliquer dès 2019 la réforme dite du reste à charge zéro. Alors que le dispositif reste un mirage lointain – 2021 c’est loin, et que les spécialistes collapsologues agitent le spectre d’une médecine low cost à l’arrière-goût de retour vers le futur, le président persiste et signe, espérant entraîner dans son sillage épique le reste de la troupe
« Nous partîmes cinq cents et par un prompt renfort… » Stéphane Junique comptait sans doute dépasser les 3000 en arrivant au port ? Son acte reste pour l’heure isolé. Coup médiatique ou sens social chevillé au corps ? La mutuelle Harmonie évoque « l’intérêt de ses adhérents » et la volonté de « lutter contre le renoncement aux soins pour des raisons financières qui touche encore trop de Français ». Dans un vibrant communiqué de presse, la mutuelle plaise sa cause : « La question de l’accès aux soins est en effet au cœur de l’ADN d’Harmonie Mutuelle. Elle agit résolument en ce sens notamment en prenant à nouveau ses responsabilités sur le sujet des reste-à-charge ». Tout en assurant qu’aucune hausse des cotisations n’accompagnera ce geste.
Une charité bien ordonnée ?
Précisons toutefois qu’il s’agit d’offrir cette prestation aux 2 millions de personnes qui ne bénéficient pas d’un contrat d’entreprises, soit des retraités, travailleurs indépendants, libéraux… et qu’ils devront pour cela se rendre chez un des 4 200 opticiens, 3 500 audioprothésistes et 3 300 dentistes conventionnés, dont les tarifs, assure Stéphane Junique, sont facturés 20 % moins cher aux adhérents de sa mutuelle. Une anticipation à moindre coût, donc, et qui sert le réseau. L’opération a cependant été chiffrée à dix millions d’euros en 2019 et 3,3 millions en 2020.
N’oublions pas non plus
qu’Harmonie appartient au groupe VYV, qui assure dix millions de Français,
rassemble près de 1 000 établissements de soin dans dix-sept domaines
d’activité, devenant ainsi le premier opérateur non lucratif en France. Ceci
n’est pas un mirage.
Le « reste à charge zéro » est une promesse du candidat Macron. Il consiste en un remboursement intégral par la Sécurité sociale et les mutuelles de certaines lunettes, prothèses dentaires et auditives.
En
France, de nombreuses personnes renoncent aux soins, ce qu’on appelle le
non-recours. Les chiffres présentés par le ministère de la Santé font état de
67% de malentendants non équipés, de 17% de personnes renonçant aux soins
dentaires et 10% aux lunettes. « Cette situation de non recours n’était
pas tolérable, a expliqué Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé.
Avec le « 100 % santé », nous avons voulu permettre aux personnes qui en ont
besoin d’avoir accès à ces soins fondamentaux, sans aucun reste à charge
financier ».
Un décret est paru au Journal officiel qui liste les
équipements concernés par le remboursement intégral et un comité de suivi a été installé au ministère. Composé des représentants des organismes complémentaires, des
associations de patients, de l’Assurance maladie et des syndicats nationaux des
secteurs de l’audiologie et de l’optique, il a pour mission d’accompagner et
d’évaluer la mise en œuvre de la réforme 100% santé d’ici 2021. Le suivi dans
le secteur du dentaire sera assuré par les partenaires conventionnels, sous
pilotage de l’assurance maladie.
Calendrier de la réforme
La mesure entre
progressivement en œuvre à partir de 2019, jusqu’en 2021. L’offre est accessible aux Français bénéficiant d’une complémentaire santé
responsable (soit actuellement 95% des contrats vendus sur le marché) ou de la
CMU-c (y compris pour les personnes aujourd’hui éligibles à l’ACS qui
bénéficieront à compter du 1er novembre 2019 de l’accès à la CMU-c). Tous
les équipements qui composent le panier 100% Santé seront pris en charge
intégralement par la Sécurité sociale et les complémentaires santé.
En 2019 Les tarifs du panier « 100% santé », seront plafonnés en audiologie et en dentaire. Le remboursement des aides auditives (Sécurité sociale + complémentaire) augmentera de 100€, le reste à charge pour les assurés diminuera de 200€ en moyenne pour les aides auditives.
À compter de 2020 • « 100% santé » sera garanti en optique, pour une partie du panier dentaire. • Pour les aides auditives, le plafond des tarifs sera abaissé de 200€ et le remboursement « Sécurité sociale + complémentaire » augmenté de 50€, soit un gain de reste à charge de 250€ en moyenne.
À compter de 2021 • « 100% santé » sera garanti pour le reste du panier dentaire et pour les aides auditives.
Pour l’optique
Au sein du
panier « 100% santé », l’accès à des montures sans reste à charge sera possible
pour des montures dont le prix sera inférieur ou égal à 30 €. L’opticien devra
mettre en avant ces montures et proposer un minimum de 35 montures pour adultes
et 20 montures pour enfants, avec 17 modèles différents de monture « adulte »
correspondant à cette gamme et 10 modèles différents pour les enfants.
Les plafonds sont de 420 euros, monture et verres, pour des lunettes à verres unifocaux avec une correction entre -6 et +6 dioptries. Les tarifs montent à 700 euros, monture et verres, pour des lunettes à verres unifocaux avec une correction plus forte allant au-delà de -6/+6 dioptries et certains verres multifocaux ou progressifs. Enfin, le plafond va jusqu’à 800 euros, monture et verres, pour une paire de lunettes à verres multifocaux ou progressifs offrant une correction encore plus forte. La monture, quant à elle, est prise totalement en charge jusqu’à un plafond de 100 euros.
Il sera possible de « panacher » des verres sans reste à charge et une monture plus chère, ou inversement. Le montant remboursé dépendra alors du contrat de l’assuré.
Pour l’audio
Les aides
auditives sont classées en deux catégories : la première catégorie fait l’objet
du dispositif sans reste à charge. La seconde catégorie permettra de proposer
des équipements à prix libre.
Les
équipements proposés dans ce panier sont des équipements de qualité – le panier
inclut les dispositifs intra auriculaires – performants, avec 12 canaux de
réglage et garanties associées : 30 jours minimum d’essai de l’aide auditive
avant achat ; 4 ans de garantie.
Un plafond
est précisé dans le décret : 950 € pour une oreille, 1 900 € au
total, et sera applicable à partir de 2021. L’appareil auditif pourra être pris
en charge tous les quatre ans.
Pour la
classe 2, à tarifs libres, le tarif de prise en charge par les contrats des
assureurs complémentaires (contrats responsables) limite la prise en charge
totale à 1700 € par oreille à
appareiller.
Pour le dentaire
Il existera
trois paniers de soins prothétiques :
1. Le panier
« 100% santé », intégralement remboursé,
2. Un panier
aux tarifs maîtrisés, via des prix plafonnés (25%),
3. Un panier
aux tarifs libres permettant de choisir librement les techniques et les
matériaux les plus sophistiqués
Le panier de soins « 100%
santé » permet de couvrir un large choix de prothèses fixes ou mobiles, avec des
matériaux (céramo-métallique, céramique full zircon, etc.) dont la qualité
esthétique est adaptée à la localisation de la dent (distinction des dents «
visibles » et celles « non visibles »).
Les tarifs des mutuelles vont-ils augmenter ?
Une étude d’un cabinet Santiane publié fin octobre, affirme que l’explosion des remboursements pour arriver au reste à charge zéro obligera les complémentaires santé à relever leurs tarifs, en moyenne de 6,8% au terme des trois ans de déploiement du dispositif. Avec une facture plus salée pour les retraités, gros consommateurs de soins dentaires et d’appareils auditifs. Pour eux, la hausse de la cotisation se situera autour de 9,4%.
Le gouvernement souhaite que les mutuelles n’augmentent pas leurs tarifs : Benjamin Griveaux, son porte-parole, a ainsi déclaré sur France 2 : « Les mutuelles se sont engagées à ne pas augmenter les prix, je les invite à respecter les engagements pris devant l’État ». Selon le président de la Mutualité française, Thierry Beaudet, la modération tarifaire devrait régner en 2020.
Des impacts encore flous…
La réforme doit se traduire par un surcoût de dépenses d’un
milliard d’euros, dont les trois quarts seront pris en charge par l’Assurance
maladie, le quart restant par les complémentaires santé.
Un bras de
fer s’est engagé entre le Gouvernement et les complémentaires pour contenir la
hausse des tarifs. Au-delà, il s’agit de trouver un équilibre entre prix
pratiqué et qualité des soins et étendue de la demande.
Pour la
Fédération nationale des opticiens de France, « aucune étude d’impact n’a
été réalisée par le gouvernement. On n’a aucune idée du comportement des
consommateurs ». Si 20% des Français se reportent sur les offres 100%
santé, Alain Gerbel, président de la Fédération craint la fermeture de 1 500 à
2000 points de vente ! Les grands réseaux pourraient se voir conforter au
détriment des petits opticiens de quartier.
Du côté des
associations de patients, si la réforme est de bon augure, la vigilance reste
de mise. Dans un communiqué, France Assos santé écrit : « Nous
restons vigilants, une enquête de l’UFC-Que choisir ayant fait état d’une
hausse de plus de 4% pour la moitié des contrats étudiés en 2019 et certains
allant même jusqu’à 20%. (…) S’engager à ne pas augmenter les tarifs du fait de
la réforme ne signifie pas qu’il n’y aura pas de hausse pour d’autres motifs. »